Mon avis

21/07/2024
Fnac
Fnac

Olivia Rosenthal - On n'est pas là pour disparaitre

Résume: 

Le 6 juillet 2004, Monsieur T. a poignardé sa femme de cinq coups de couteau. Quand, lors de son interrogatoire, on a demandé à Monsieur T. pourquoi il avait agi de la sorte, il a été incapable de répondre. Comment vous appelez-vous ? Pas moi. Quel est votre prénom ? Il ne m'appartient pas." On n'est pas là pour disparaître part du portrait d'un homme atteint de la maladie d'Alzheimer pour saisir sur le vif ce qu'est la perte de la mémoire, de la parole et de la raison. Avec ce septième livre optimiste et désespéré, Olivia Rosenthal confirme son talent et son inventivité langagière.

Avis: 

Au premier abord la forme est originale et déstabilisante. Même en ayant avancé dans le récit on ne s'y habitue pas. Les pensées de l'autrice sont une sorte d'exutoire à sa crainte de faire face à la maladie mais également pour nous. Du fait de toutes ces pensées qui fusent tout au long du texte, on a l'impression de retrouver la forme du journal intime. Il n'y a pas de structure apparente, tout est jeté comme cela vient sur le papier. Il y a certains moments qui sont longs et peu intéressants, tels que les longues répétitions ou les longs passages avec les pensées de Monsieur T. J'ai été énormément touché par la détresse de Monsieur T mais aussi par celle de ses proches notamment sa femme. On a un accès au désarroi face à la maladie de A. 

Je trouve que la mise en forme est en écho avec la mise en sens. La façon d'écrire, dont tout s'enchaine assez vite, sans fil conducteur ... nous amène finalement à comprendre ce que peut éprouver un patient souffrant de maladie de A. De plus nous avons beaucoup de blancs qui pourraient être mis en relation avec les moments où il ne se passe rien, le vide de souvenirs qui ont été effacé... 

On a également beaucoup d'interlude avec une autorité qui permet ce retour à la réalité et de s'y encrer en se servant de faits factuels. Et de peut- être mettre une certaine distance. Au début de l'ouvrage on part de la date du 6 juillet 2004 et on remonte le temps jusqu'à la fin du récit, pour arriver au 15/11/2000. Cela permet un retour en arrière pour voir l'évolution de la maladie. Et on retrouve Monsieur T, des informations sur lui, sur sa vie, qui il était. Dans le sens inverse de la maladie. On a deux temporalités qui s'entremêlent ce qui est assez dur à gérer. Plus on avance plus c'est décousu, répétitif ... à l'image de la maladie. Je trouve aussi que les autres voix ne sont pas assez entendues. 

Quand elle parle du fait de faire des enfants pour ensuite avoir quelqu'un qui s'occupe de nous, j'ai trouvé cela moralisateur et culpabilisant. J'ai également trouvé cela rude de nous dire que l'on ne meurt jamais de vieillesse mais toujours de maladie. J'ai trouvé cela maladroit. Elle écrit d'une façon qui ne nous laisse aucun répit, on est constamment stimulé, en questionnement. J'ai trouvé cela dur de lire que la seul échappatoire à la maladie serait la mort. Mais finalement ils n'ont même pas conscience qu'il y en a une. On reste bloqué entre le début et la fin. Ou bien entre le début d'une fin et une fin ignorée. Elle tente de redonner du sens à cette vie fragmentée, à ses souvenirs qui s'éparpillent et s'envolent sans que l'on puisse les retenir.

Finalement à la fin de la lecture, j'ai réalisé que ce qui me terrifie le plus dans la maladie, c'est non pas la maladie en elle-même et son état car une fois que nous l'avons, nous oublions. On ne peut pas s'inquiéter de quelque chose que nous n'avons plus sans en avoir conscience. Non, ce qui m'inquiète c'est le début et la fin. C'est la prise de conscience que quelque chose ne va pas, que quelque chose m'échappe. Et puis la fin dont finalement je n'ai pas à m'inquiéter car j'aurai oublié, mais qui sur l'instant me paraît importante: c'est cette régression à l'enfance. Mais peut-être que c'est plus le regard des autres qui m'importe, mais quand les autres n'existent plus, est-ce que c'est vraiment important ? Et ce qui me fait également peur c'est la répercussion sur mes proches. La maladie de A impacte le malade mais tout autant la famille. Et puis, je n'ai pas envie que cela m'arrive alors que je suis encore jeune. Car maintenant cela arrive de plus en plus jeune. Bon et bien, peut-être que finalement cette maladie me terrifie. Ne plus exister pour les autres: d'accord mais ne plus exister pour moi-même: non. Peut-être que cela est égoïste mais c'est la maladie qui l'est, elle garde tout pour elle. Mais faire comme si. Comme si cette maladie n'avait pas de prise sur moi. C'est mon moyen pour moi de ne pas seulement survivre mais vivre. On pense que cela n'arrive qu'aux autres, mais au final ça peut être génétique et ça devient quelque chose d'inévitable.

Note:

⭐️ ⭐️⭐️,5 / 5


Les derniers articles de notre blog

Restez au courant 

Mon avis

21/07/2024

Olivia Rosenthal - On n'est pas là pour disparaitre

Mon avis

23/05/2024

Blake Pierce - Le Quartier Idéal

Créez votre site web gratuitement ! Ce site internet a été réalisé avec Webnode. Créez le votre gratuitement aujourd'hui ! Commencer